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Le blog de Saamarande
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13 avril 2008

« Génération Digital Natives », petite histoire d'une génération spontanée ou Lamarck au pays des TICE.

Par Jean-Michel Valette,

« Génération  Digital  Natives ».

C’est le titre du dossier de la dernière livraison du Monde de l’éducation (avril 2008).

Les « Digital Natives »  ce sont ces enfants qui ont toujours connu Internet et qui ont été nourris aux mamelles du numérique, du multimédia et de l'information instantanée.

« Digital Natives » est un néologisme et un concept inventés (et déjà controversé, apprend-on dans le dossier) par un consultant américain en TICE (nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement), Marc Prensky . Voici les deux articles qui résument les « thèses » de Monsieur Prensky, ici  et .

   

Tant d'heures passées devant les écrans ont ainsi forgé une génération d'élèves « mutants » dotés d'un  cerveau modifié[it is very likely that our students’ brains have physically changed – and are different from ours] : les fameux « Digital Natives »(DN pour la suite!), dont le numérique est la langue maternelle [native language].

Et oui,  que la fonction (ou l'occupation) crée ou modifie l’organe, est un principe phylogénétique bien connu depuis Lamarck, le père de la théorie dite « transformiste » et de la génération spontanée (ainsi que de l'hérédité des caractères ainsi acquis, pour être tout à fait complet) !

Comme le cou de la girafe de Lamarck - dans sa célèbre Philosophie zoologique (n'est-ce pas Petite Noisette?  :)))  - s'allonge à force d'aller chercher les feuillages haut perchés, le petit d'homme du XXIème siécle sachant surfer acquiert peu à peu un cerveau d'un nouveau type façonné par le numérique!

Ces zombies des temps modernes auraient ainsi développé des façons particulières de raisonner du fait de la fréquentation assidue de l’ordinateur.  On reconnaît ainsi un vrai « Digital Native » au fait qu’il privilégie les accès au savoir et les approches aléatoires(notamment hypertextuelles) par opposition à un rapport à la connaissance plus classique et systématique et qu'il a du mal avec le raisonnement démonstratif « pas à pas ». Le DN  se distingue également par son potentiel d'attention et de concentration digne d'un moucheron lorsqu'il s'agit d'effectuer des tâches d'un autre âge ou lorsqu'il n'est plus connecté[They function best when networked ] ! Bien sûr, tout DN qui se respecte s’ennuie en cours...ce qui est un phénomène nouveau que l’ancienne génération n’a évidemment jamais connu !

Par ailleurs, le Digital Native a besoin pour évoluer de plaisir immédiat et de récompenses fréquentes [they thrive on instant gratification and frequent rewards]. - un peu comme le toutou de Pavlov en somme, pour rester dans la veine éthologique.

Outre son goût pour les approches aléatoires - « sérendipiennes » (ça, c'est plutôt un côté sympa), pourrait-on dire avec Sylvie Catellin - d'autres spécificités peuvent être mises au crédit du digital native . Il a le goût des tâches multiples et simultanées, préfère le visuel et le graphique au textuel et s'épanouit « à donf » dans le jeu et l'interactivité. Et oui, le jeu est   l'activité préférée du DN, l'alpha et l'oméga de ses apprentissages et de son « être-au-monde ».

Par opposition aux « Digital Natives » nous apprenons par la même occasion que nous, les vieilles créatures hybrides et amphibologiques qui avons connu le papier avant l’ordinateur, nous sommes des « Digital Immigrants »(DI). Deux caractères principaux caractérisent le DI. Le fait qu'il imprime ses mails(!)(vieux réflexe « papier » incorrigible!) [There are hundreds of examples of the digital immigrant accent. They include printing out your email (or having your secretary print it out for you – an even “thicker” accent); needing to print out a document written on the computer in order to edit it ...] et une acculturation au numérique très laborieuse voire impossible. Après un certain âge, le cerveau ne mute plus, la « plasticité » - un concept majeur pour Prensky! -  en prend un sacré coup, tout se joue dès les premières années!

Pour exploiter les nouvelles structures mentales de ces petits mutants, l'école doit donc s'adapter et changer de paradigme.

Remèdes (vagues) préconisés par notre super consultant en TICE.

En finir avec la pédagogie frontale, privilégier l'autonomie, l’interactivité et le travail de groupe. Et surtout...des jeux, des jeux et encore des jeux! [And I submitted that learning via digital games is one good way to reach Digital Natives in their native language .]

Etre, c'est être connecté...et jouer!

(Au passage nous avons voulu en savoir un petit peu plus sur ce Monsieur Prensky. Une petite visite de son site nous renvoie vers moult prestations et produits dérivés et notamment, en cliquant sur la rubrique « products », nous sommes renvoyés vers une société commerciale « games2train.com »   (dont Prensky est le fondateur et le directeur général) qui propose des jeux surprenants. Comme cette version du « solitaire » consacrée à la prévention du harcèlement sexuel! Ou encore ce certificat – destiné aux entreprises, cette fois-ci! - de prévention du harcèlement sexuel « Protecting you, your colleagues and your company from sexual harrassement - Press the button to begin your certification »!

Bref...assez loin des nouvelles technologies de l'information et de la communication pour l'éducation, de la dynamique de groupe et de l'interaction aux accents piagétiens vantées quelques lignes plus haut par ce même Monsieur Prensky!)

Evidemment...au-delà de ce qui sent tout de même un petit peu le coup marketing - que nous avons voulu pointer dans ce petit billet avec un peu d'humour, espérons-le(!)- le phénomène des « digital natives », ces enfants nés avec l'Internet, correspond à une certaine réalité et pose des questions que l'école ne peut ignorer.

L’expérience pédagogique dans une école primaire d’Amiens décrite dans un article du dossier du Monde de l'éducation est à cet égard très enrichissante et pourrait servir d'exemple pour une nouvelle pédagogie intégrant les TICE (Microsoft mis à part !).

Il faut lire également l'enquête très complète de Christine Dioni « Métier d'élève, métier d'enseignant à l'ère du numérique »   - qu'avait signalée Saamarande .

Cette étude, qui fait une grande part à la sociologie et aux méthodes sociologiques(enquêtes, entretiens semi-directifs..), au-delà des clichés, des recettes toutes faites et des petites mythologies à but marketing, rappelle les vraies questions que la révolution numérique pose à l'école.

Sont notamment abordés dans cette étude les points suivants: la fracture numérique scolaire (entre élèves et professeurs, entre parents et enfants); usages et mésusages des TIC; comment réellement intégrer les TIC à l'enseignement; typologie des différents usages en autonomie que l'élève fait de l'Internet; mieux prendre en compte les activités parascolaires autonomes des élèves avec les TIC; et pour finir, la très intéressante question « enseigner avec les TIC ou éduquer aux usages des TIC? »( le « ou » en question n'étant pas pour C. Dioni un « ou » exclusif mais un « ou » union, l'intégration des TIC dans l'enseignement allant de pair avec une éducation aux usages des TIC, mais la question méritait d'être formulée aussi clairement)

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Commentaires
P
Merci pour l'article, très bien documenté et argumenté.<br /> Je suis néanmoins sceptique quant à certaines des allégations de ces messieurs. N'y aurait-il que les DN qui s'ennuient à l'école ?
T
Hors-sujet : une petite image trouvée sur un site. Sensée être humoristique, mais...<br /> <br /> http://www.nioutaik.fr/images/galerie/2304064020_11310fdfe3_b.jpg
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